Saisine de la CNDP, pour un vrai débat sur l’avenir énergétique de la France
Il est temps.
Il est temps qu’enfin, nous ne considérions plus les politiques et les choix énergétiques comme un domaine réservé au seul président de la République. Je sais que nous y avons pris l’habitude, depuis les premiers programmes nucléaires civils développés à l’ère du Gaullisme. Mais le contexte était drastiquement différent, et c’est Emmanuel Macron qui le résume le mieux à travers sa formule de « la fin de l’abondance », dont le point de focale était, naturellement, énergétique.
Cela fait pourtant des décennies que les écologistes militent pour la sortie des énergies fossiles, par nature volatiles dans le prix et l’offre, même si leurs crises sont perçues comme ponctuelles et relativement espacées dans le temps. Avec le recul des événements récents, il semble que plus personne ne puisse ignorer que cette dépendance nous rend extrêmement vulnérables à l’épuisement de leurs réserves ainsi qu’au bon vouloir de pétromonarchies et autres États autoritaires. Tout ça sans naturellement parler de la plus grande menace pour l’humanité, que sont les changements climatiques. Certain-es vendent le nucléaire comme une solution possible à l’électrification nécessaire des usages. Nous, Écologistes, sommes opposé-es à ce choix énergétique, et à nos arguments historiques s’ajoutent de nouveaux, très contextualisés, sur lesquels je ne reviendrai pas ici.
Cela étant, tant l’existence d’une controverse que l’importance vitale du sujet devraient, dans une société démocratique, faire émerger un débat sérieux dans un cadre institutionnel à la hauteur de l’enjeu. Notre avenir énergétique à moyen et long terme, en interaction avec le climat, notre économie future et notre environnement géopolitique, déterminera à lui seul la direction que prendra notre société. Peu de décisions vont avoir autant d’impact sur l’avenir de la Nation, du monde, et des générations futures. Toute personne se revendiquant démocrate, pro- ou anti-nucléaire, devrait accepter ce constat et donc l’impératif de prendre une décision réellement collective.
Pourtant, le président a décidé, seul, de l’avenir énergétique de la France, de ses citoyens et de leurs enfants. On sait que le gouvernement organise une simple concertation nationale pendant quelques semaines (24 octobre au 31 décembre 2022), mais elle ne constitue pas un réel débat, elle n’offre pas les garanties de neutralité, d’indépendance ou d’inclusion. La construction de nouveaux EPRs semble bien être une décision déjà prise : le président les a déjà confirmés, et un projet de loi présenté en conseil des ministres le 27 septembre dernier a déjà proposé d’en accélérer le processus. Mais l’avenir du nucléaire en France ne peut pas être décidé par quelques personnes, à la va-vite. Nous avons besoin d’une responsabilité nationale, d’une décision publique, de choix démocratiques.
Dans la Drôme, l’implantation de nouveaux EPR2 à côté de la centrale du Tricastin est en exemple, une décision « venue d’en haut », qui met en compétition nos territoires avec ceux du Bugey, et n’ont pas fait l’objet de débats ni de concertation avec les plus de 200 000 riverain-es de la centrale.
C’est pourquoi, avec 113 député-es de cinq groupes différents, de la France Insoumise au MoDem, j’ai décidé, le 25 octobre dernier à l’Assemblée Nationale, de mener la saisine de la Commission Nationale du Débat Public pour porter le débat de notre mix énergétique futur et la place du nucléaire dans celui-ci. Crise écologique, hydrique, sanitaire, sociale, démocratique : tout nous dit que c’est collectivement qu’il faudra aborder les temps à venir, collectivement qu’il faudra bâtir des solutions justes et durables, collectivement qu’il faudra s’assurer de notre sécurité, alimentaire, hydrique, et énergétique.
Nous voulons informer, débattre, et choisir – en conscience – du niveau de risque auquel nous sommes prêt-es à consentir pour assurer notre approvisionnement énergétique. Le cadre offert par la CNDP permettra un débat neutre, indépendant et éclairé.
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